'Today I'm 56 years old!'

 'Today I'm 56 years old!  Thank you to my friends, my loved ones, my family and Yoko for giving me the best moments of my life: as a kid, I would have loved to share these moments.  I'm lucky to be surrounded by bright, honest, funny and happy people! It's a great opportunity to live extraordinary adventures with them every day. Vive la vie!'

Régis Campo, 06/06/2024 Paris
Régis Campo in 70's, Ardèche, France

 "Régis Campo, un académicien qui a le goût du risque et de la mélodie" 

Le Monde 26/05/2023 par Pierre Gervasoni

Régis Campo, compositeur et membre de l’Académie des beaux-arts, le 22 mai 2023, à l’Institut de France, à Paris. AUDOIN DESFORGES/PASCO POUR « LE MONDE »

La création d’Art Spirit, à Toulouse, le 26 mai, et un slow pour le disque de la plasticienne Orlan témoignent des audaces du compositeur, qui siège par ailleurs à l’Institut de France depuis 2017.

La musique de Régis Campo est longtemps apparue comme une source d’énergie inépuisable et communicative, à l’instar de Street-Art, fresque pulsée avec une maîtrise époustouflante de la transe collective, dont l’ensemble TM + a livré un enregistrement de référence pour le label Signature, en 2019... jusqu’à la pandémie de Covid-19, en 2020, dont le compositeur, né en 1968, a beaucoup souffert, sur un plan tant physique que spirituel. « C’est la première fois de ma vie où je ne voyais plus de futur », confie-t-il aujourd’hui, en se remémorant avoir été obligé d’abandonner la partition d’orchestre qu’il avait entreprise, avant d’être tétanisé par le virus. Il lui fallut une bonne semaine pour retrouver une respiration normale, « et, avec elle, la voix, le chant, la mélodie... »
Bien que fortement ancré dans le paysage contemporain, enclin aux innovations en tout genre, Régis Campo est resté attaché à la mélodie, depuis ses débuts de compositeur à Marseille, sa ville natale, en 1983. Et la pièce « post-Covid » The Wonder of Life, qui a été créée en 2021 à Radio France, a confirmé cette orientation, même si cette fois il s’y est pris d’une manière très différente. « J’avais besoin de me libérer, explique Régis Campo, et je l’ai fait en utilisant un choral de Bach qui me hantait depuis l’enfance. Je l’ai étiré pendant une douzaine de minutes, sans doute parce que mon esprit fonctionnait alors au ralenti. » Le résultat est stupéfiant. Il procède d’une démarche solennelle mais fourmille de fantaisie. Cette partition aurait-elle marqué un changement de cap ? Le compositeur répond par l’affirmative. « Rompre avec la virtuosité et enchaîner des accords tenus, c’est prendre un énorme risque. »

Référence à David Lynch

Art Spirit, l’œuvre qui sera créée, le 26 mai, à Toulouse, par l’Orchestre national du Capitole s’inscrit, à de nombreux égards, dans la filiation de The Wonder of Life, par un semblable processus de « libération », par un nouvel emprunt à Bach et par la référence cinématographique induite par le titre. The Wonder of Life opérait un raccourci de deux films de Terrence Malik (The Tree of Life, en 2011, et A la merveille, en 2012) ; Art Spirit est lié à David Lynch qui, un jour, a déclaré que son livre de chevet était The Art Spirit, publié en 1923 par Robert Henri (non traduit). Le 7art est une source d’inspiration logique de la part de quelqu’un qui se dit très proche, à l’Académie des beaux-arts, des cinéastes Coline Serreau (dédicataire de The Wonder of Life) et Jean-Jacques AnnaudPlus significative encore, la formation de Régis Campo par la prise en dictée des musiques de film, dès l’enfance : il s’est ainsi formé tant à la mélodie qu’à l’orchestration. Un effet spécial réalisé par John Williams dans la bande-son des Dents de la mer (Steven Spielberg, 1975) l’a longtemps intrigué. Il sait aujourd’hui qu’il a été obtenu par le frottement d’une baguette « superball » sur un gong. Ses autres coups de cœur ont pour nom Ennio MorriconeVladimir Cosma ou György Ligeti (qu’il a découvert par le film 2001, l’Odyssée de l’espace, de Stanley Kubrick, en 1968). 

Plus que les études, au conservatoire de Marseille, dans la classe de Georges Bœuf (1937- 2020), puis au « National » de Paris, dans la classe de Gérard Grisey (1946-1998), c’est le vécu et les rencontres qui ont façonné l’artiste. A 13 ans, il assiste à la première production du théâtre La Criée, à Marseille, O Scapin (1981), dans une mise en scène de Marcel Maréchal, et tombe sous le charme de tout ce qu’il y découvre. « L’odeur des maquillages, la poussière des décors... je suis fou du spectacle », s’enflamme Régis Campo, qui, dès l’âge de 8 ans, a nourri une même passion pour l’opéra – qu’il s’agisse de l’œuvre de Wagner ou du vieux bâtiment marseillais où on la donnait.

Berceuse à vocation érotique

L’amitié qu’il a entretenue avec certains de ses aînés a également beaucoup compté. Si Edison Denisov (élève de Dmitri Chostakovitch, dont il a admiré la capacité à s’exprimer dans tous les genres) et Henri Dutilleux (qu’il a connu après avoir remporté, en 1996, le concours de composition parrainé par le maître) semblent proches de son univers, ce n’est pas le cas de Vladimir Cosma, qui voit en lui « le lien idéal entre la musique contemporaine et la musique de film ».

L’homme semble ouvert à toutes les expériences. Il a écrit un solo d’accordéon en hommage à Gérard Grisey et composé un envoûtant concerto pour thérémine, instrument électrique très peu usité. Et il a accepté de participer au disque un peu kitsch Le Slow de l’artiste, lancé par la plasticienne Orlan, qui sortira le 26 mai, et pour lequel l’artiste a invité une vingtaine de musiciens à créer des mélodies pour accompagner ses textes.

Régis Campo a respecté les codes du genre, a travaillé sur le multipistes et a recherché une vocalité pop. « J’ai débuté par une sorte de “Requiem” de Verdi très étiré, mais cela ne s’entend pas », révèle le musicien. Orlan a accueilli son slow, Je suis au soleil, en déclarant : « Ce n’est pas un slow. » Avec raison, car il s’agirait plutôt d’une berceuse à vocation érotique pour grand enfant qui fait mine de ne pas y toucher. Une audace fatale à l’académicien qui n’en finit plus de rompre avec l’académisme ? « Maintenant, à chaque fois que je fais une pièce, je me dis que ça va être la dernière et que mes amis compositeurs ne vont plus me parler. » Un nouveau tournant post-confinement ?

Art Spirit (création), de Régis Campo, par l’Orchestre national du Capitole. Halle aux Grains, Toulouse, le 26 mai à 20 heures. Onct.toulouse.fr

Le Slow de l’artiste, d’Orlan, 2 CD (Studio Orlan, à partir du 26 mai). 

Pierre Gervasoni


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