PRESS REVIEW: "UN RÉGIS CAMPO LUDIQUE ET SÉDUISANT AVEC STREET ART" BY PAR JEAN-PIERRE SICARD - RESMUSICA.COM

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Un Régis Campo ludique et séduisant avec Street Art
D’un accès facile, même pour ceux que la musique contemporaine n’attire pas, Street Art entraîne dans son rythme jubilatoire. L’humour, le travail sur les timbres, le bercement de rythmes répétitifs jamais rébarbatifs, alternent avec des moments plus intérieurs et une grande poésie vocale.
L’excellent ensemble TM+ dirigé par Laurent Cuniot, propose ici toute une palette d’œuvres de Régis Campo, académicien ludique, dont la liberté de ton peut surprendre. L’énergie joyeuse de la pulsation l’emportent sur la rythmique répétitive. On a envie de danser, de « s’éclater », même si les pièces solistes ou chantées, plus intériorisées, renvoient vers l’émotion.
Le titre Street-Art pourrait être un clin d’œil facile à l’air du temps, mais la référence est plus profonde : hommage aux cultures urbaines d’une part, travail sur la forme, d’autre part, quand elle articule références populaires, motifs et rythmes accrocheurs, avec un traitement rythmique et un travail sur les timbres très riches, au service d’une construction globale forte. Reflet de notre époque qui mixe de nombreuses influences, l’œuvre, et celles qui l’entourent, évoquent différentes musiques du XXᵉ siècle, de Stravinsky à Steve Reich, de John Cageà Léonard Bernstein, de Gérard Grisey à Ennio Morricone, mais aussi l’excitation pulsionnelle et l’envie de danser des années 70, le monde du post-rock, voire du Punk.
Après les 16 minutes de Street-Art, pendant lesquelles viennent des images de ballet, entre Béjart et les danses urbaines d’aujourd’hui, Sometimes with the Heart, sur un court poème d’Emilie Dickinson, interprété avec une délicate émotion par Sylvia Madimova et Sylvain Le Pape, plonge dans une douce rêverie, mais dans Oh Sweet Kisses!!, les modes de jeu contemporains de la clarinette réveillent, comme un petit enfant bercé avec une comptine, à qui des bisous sonores et exagérés donnent soudain le fou-rire. Steamy Punk offre de même à la flûte un beau solo. Mysterium simplicitatis commence comme une impro au piano d’un chanteur de romance, mais ses motifs impressionnistes sont au service d’une structure rythmique obsédante.
Pop-Art est une autre référence emblématique. Le retour aux années soixante renvoie aux influences musicales de Régis Campo, davantage que l’art urbain d’aujourd’hui, auxquelles il les confronte. Mais au-delà de la rigueur de la logique répétitive, de nombreux effets de timbres et des clins d’œil mélodiques créent un regard ironique sur les excès formels du passé. Trois Morgenstern Lieder plongent alors dans l’étrangeté d’une voix qui cherche son chemin. Le pianiste produit frottements et percussions sans le clavier ni les cordes, ce qui donne une grande force aux rares notes de piano. Dans Erotique rotative, le soliste donne aussi de la voix, du sifflement, du frottement, des baisers… Julien Le Pape, au piano très lumineux, aurait l’air de bien s’amuser si on ne devinait pas la rigueur de son travail d’interprétation. Le balancement de Une solitude de l’espace est comme une musique de film qui nous promet un ailleurs poétique, dont on devine qu’on ne l’atteindra jamais. Son développement très progressif, propre à la musique répétitive, crée une attente toujours repoussée, mais aussi une lente montée d’émotion. Jean-Pierre Sicard, resmusica.com 



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