🌐 "JE FAIS LE CLOWN, ET ILS ME LAISSENT TRANQUILLE. " DESABUZZE.BLOGSPOT.COM

"CONTEMPORAIN MAIS JOYEUX"  
Régulièrement programmé dans les grandes salles de concert, Régis Campo fait partie de ces artistes marseillais qui font rayonner leur art dans le monde sans renier leurs racines. Rencontre avec le compositeur dans sa salle de cours au conservatoire.  
Régis Campo, quelle est votre création la plus récente ? 
Je viens d'écrire mon 5e quatuor à cordes, qui a été créé à la salle Gaveau à Paris par le quatuor Parisii. Cet ensemble célébrait ses 30 ans d'existence, ce qui est très honorable pour un quatuor français. Mais j'adore aussi écrire pour l'orchestre. Depuis l'enfance, je suis fasciné par les belles pièces symphoniques, telles que les ouvertures de Wagner ou les pages de Ravel et de Debussy que mes parents écoutaient souvent. J'ai donc ce goût pour la belle ouvrage. Et j'ai été très heureux que l'orchestre de ma ville, sous la direction de Jean-Claude Casadesus, crée une de mes pièces l'an dernier à l'opéra.  Pouvez-vous décrire votre esthétique, parfois à contre-courant de la musique savante dominante ? 
Disons qu'il y a l'art « contemporain », et moi je ne suis pas « content pour rien » ! J'aime la musique qui a de l'humour. Ce qui vient aussi d'une certaine tradition, parfois de légèreté, du grand répertoire français. Je me sens proche d'un Satie, d'un Poulenc. Dans un idiome pourtant complètement différent, je ressens la filiation à mon insu.  
Comment vos collègues vous ont-il vu arriver dans le cercle fermé des compositeurs reconnus d'aujourd'hui ? 
Vous savez, à Paris, je suis un peu comme Fernandel dans « Le Schpountz » ! Je fais le clown, et ils me laissent tranquille. Comme Pagnol, entraînant des clichés bon gré mal gré …  En tous cas, de grands interprètes s'intéressent à votre musique, comme la soprano Felicity Lott ou bien d'autres ? J'ai adoré Felicity. On a fait un grand cycle, le Bestiaire, d'après les poèmes d'Apollinaire. Il y a eu aussi Kent Nagano, Laurent Korcia, Zoltan Kocsis. Ce sont des projets qui sont venus par le hasard des rencontres, et qui ont suscité des amitiés durables.  
Vous êtes à Marseille régulièrement, en tant que professeur de composition au conservatoire. Quel est votre rôle exact, comment peut-on apprendre à composer ? 
En fait, on est comme un grand frère qui vient aider plus jeune que soi à aller dans sa propre direction. Un peu de manière intuitive puisque je pratique un grand balayage esthétique. Je leur fais écouter des choses très différentes, parfois selon leur goût, pour déclencher certains germes pour tel ou tel type de musique. Après cela se développe chez eux. Sans omettre l'aspect technique, car on peut apprendre à bien harmoniser, à bien écrire pour les instruments.  
Ces élèves ont-il souvent l'occasion d'entendre ce qu'ils composent ? 
C'est primordial. On les fait beaucoup jouer, je veux qu'ils écoutent leur musique. Parfois, je les pousse à diriger leurs propres œuvres. Pour certains, c'est même la première fois qu'ils dirigent. Après ils composent différemment, ils deviennent un peu plus professionnels dans leur écriture.                                            
Là je tombe sur une de vos partitions récentes, qui est parsemée de dessins de lèvres ! Pratiquez-vous souvent ce type de détournement ? 
Parfois j'essaie d'être sérieux, puis après je n'y arrive plus du tout, et je me mets à écrire des pièces assez humoristiques. Ici c'est une pièce où le clarinettiste fait des bisous avec le bec, mais c'est un effet qu'on faisait très sérieusement dans les années 70 ! Mais malgré tout j'ai aussi d'autres grands projets, comme un opéra en 2014, « Quai Ouest », sur une pièce de Bernard Marie Koltès, pour l'opéra de Nüremberg. C'est un immense travail d'équipe avec le librettiste, l'adaptateur, le metteur en scène, le choix des chanteurs. Avant, les compositeurs restaient dans leur tour d'ivoire pour composer leur opéra. Là je prends vraiment des conseils, je réfléchis sur le livret qui est un peu comme un scénario de film.  
On peut aussi vous retrouver sur de nombreux CD. Que nous conseilleriez-vous pour découvrir votre musique ? 
Par exemple un interprète que j'aime beaucoup, Dominique Visse, a enregistré mes « Cris de Marseille » avec l'ensemble Clément Janequin chez Harmonia Mundi. Ce qui m'émeut, c'est d'avoir composé ces « Cris de Marseille » alors que nous avions depuis des siècles les « Cris de Paris » de Janequin. Je trouvais absolument nécessaire de répondre à ce Parisien !  
Propos recueillis par Philippe GUEIT 
Publié le 02/02/20132013 par DésaBuzzé
"COLOR !" (final) for orchestra (2011) by Régis CAMPO 
© éditions Henry Lemoine orchestre philharmonique de Marseille 
Jean-Claude Casadesus, conductor
🔗 Clip Vidéo:  https://www.youtube.com/watch?v=dwQI2UkaXO0


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