«On passe à la classe supérieure… pour enfin décoller» par Kristian Frédric - La Dépêche du 20 septembre 2014





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«On passe à la classe supérieure… pour enfin décoller»


Une fois par semaine, le samedi, le metteur en scène Kristian Frédric, résidant dans le Villeneuvois, raconte aux lecteurs de «La Dépêche du Midi» l'odyssée de la création de son premier opéra, «Quai Ouest», d'après l'œuvre de Bernard-Marie Koltès, à l'opéra du Rhin à Strasbourg.
«Chaque semaine m'apporte son lot de découvertes et de surprises. C'est fait, nous avons fait les premiers filages. Pour ceux qui ne connaissent pas, sachez que ce n'est pas de la couture avec des tissus venus d'Orient mais le déroulé du spectacle qui s'exécute devant vous. Ici, ils appellent cela la générale piano, c'est tout le spectacle dirigé par le chef d'orchestre Marcus Bosch avec un pianiste (comme seul instrument) et, bien sûr, les chanteurs. Premiers frissons, premières peurs qui s'immiscent en vous. Premiers questionnements. Mais l'on sent tous dans la salle que cet opéra peut exister et rayonner.
On le sent, mais je n'attends plus que l'Italienne. Non ce n'est pas une jeune femme venue de Rome ou de Florence qui arriverait dans le théâtre, non ! Ni Nino Moretti qui viendrait me rejoindre avec son Vespa, pour boire un verre. C'est les 7 chanteurs assis sur des chaises qui chantent toute la partition, face à la fosse d'orchestre et, tenez-vous bien, 60 musiciens ! Oui vous avez bien entendu, 60, dont 18 violons ! Une harpe, une guitare électrique et tellement d'instruments que je n'arrive pas tous à les définir (de toute façon, je ne les connais pas, et je n'ai pas été présenté).
Et là, vous entendez enfin la musique, après plusieurs semaines avec comme seul compagnon un piano. Voilà, c'est parti, on passe à la classe supérieure, on s'aligne devant la piste du tarmac, pour enfin décoller. Et non d'un petit bonhomme, on décolle, la musique est magnifique. Je prends conscience de la folie qui doit régner au quotidien dans la tête du compositeur Régis Campo. Comment peut-on arriver à entendre dans sa tête chaque instrument, chaque note ? C'est très émouvant de se rendre compte que l'on participe à la création d'une œuvre musicale comme celle-là. Je voudrais me pincer tout le temps, mais je veux éviter de me maltraiter. Alors, j'approche de la fosse d'orchestre et les observe répéter avec le chef. Je suis là, je ne gêne personne ; au contraire, je suis le bienvenu, je fais aussi partie à cet instant de cette famille. Je suis là à regarder Marcus s'envoler à travers les notes avec une telle passion que je ne peux m'empêcher de pleurer. Que c'est bon d'être vivant !"
Kristian Frédric
Publié le 20/09/2014 à 03:53

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